Actualités

2017, l'année de Stephen King

Par Republ33k
18 septembre 2017
2017, l'année de Stephen King

Si la menace de Ça revient tous les 27 ans, Stephen King, son créateur, n'a jamais attendu aussi longtemps entre deux adaptations de ses œuvres. Mais il bat de nouveaux records en 2017, qui est désormais l'année la plus prolifique du côté des séries et des films inspirés des écrits du tout aussi prolifique écrivain. Mais comment expliquer cette convergence ? En cette semaine de sortie du nouveau Ça, essayons de recoller les morceaux ensemble.

A n'en pas douter, l'omniprésence de Stephen King en cette année 2017 est particulièrement liée au revival des années 1980, qui touche tous les domaines, de la mode à la musique en passant bien sûr par la télévision et le cinéma. Avec une dizaine d'œuvres écrites et pas moins de 16 adaptations au compteur, les années 1980 forment en effet l'une des décennies les plus prolifiques de l'auteur, si ce n'est la plus prolifique. C'est en tous cas l'une des plus respectées dans la longue carrière de l'auteur, d'autant qu'elle a d'ailleurs vu naître Ça ! A l'heure où les années 1980 reviennent en force, il n'est donc pas étonnant de voir King et ses écrits, quelque part emblématiques de cette décennie - du côté de la pop'culture américaine en tous cas - reprendre du poil de la bête et surfer sur une certaine nostalgie, qui a déjà fait des petits. Mais nos y reviendrons.
 

 
Car le simple retour en force des eighties ne saurait expliquer la recrudescence des adaptations de Stephen King, au nombre de cinq rien que cette année. Assurément, ce sont aussi les mutations du genre horrifique qui permettent à La Tour Sombre, Ça, Jessie, 1922 ou encore à la suite des Démons du Maïs de faire leur (ré)apparition sur les écrans. Piégée depuis quelques années déjà dans l'enfer des licences immortelles et particulièrement rentables, de Saw à Paranormal Activity, l'horreur évolue enfin depuis quelques mois, en témoigne les succès d'un film comme Get Out. Très clairement, plusieurs producteurs et quelques décisionnaires ont perçu une certaine lassitude dans les habitudes du public, et y voient l'ouverture que beaucoup de spectateurs attendaient. Résultat, on se retrouve avec des Split, des Ça et bientôt, d'autres productions encore plus originales, on l'espère. Elles n'empêcheront d'ailleurs pas les marronniers de fonctionner, en témoigne le triomphe du dernier Annabelle. Mais à n'en pas douter, le spectre de l'horreur, qui s'élargit à nouveau, autorise le tout Hollywood à ré-ouvrir les bouquins de King, sans craindre qu'ils soient ou non conformes aux tendances du moment. Au contraire, les idées de l'auteur, qu'elles soient géniales ou folles, offrent à l'industrie un moyen de se distinguer de la concurrence. Du moins, jusqu'à ce que la norme ne devienne l'horreur nostalgique à la Stephen King - tout est affaire de cycles, rappellez-vous. Mon cher Alex LeCoq me faisait d'ailleurs remarquer le côté paradoxal de la chose : c'est une horreur à l'ancienne qui vient sortir le genre de ses maux les plus modernes.
 
Et d'après le succès au box-office mondial de Ça, parier sur Stephen King est plutôt rentable, pusique le film d'Andy Muschietti abat les records des films d'horreur les uns derrière les autres. Mais on aurait tort de cataloguer les adaptations de King comme bankable pour autant. D'une part parce que les œuvres de l’auteur, et par extension leurs adaptations, sont trop nombreuses pour toutes être des succès. D'autre part, parce que tout le monde n'ose pas adapter les œuvres de Stephen King pour ce qu'elles sont. Si elle ne s'inscrit pas tellement dans le registre de l'horreur, La Tour Sombre le montre bien, par exemple, en ayant lissé le plus possible les originalités de cette oeuvre complexe. Cependant, vous connaissez Hollywood : si un projet se présente bien - et en l'occurrence, voilà des mois qu'on entend du bien de Ça - ou si une tendance émerge, on voit se former de véritables bandwagons de producteurs ou de studios, qui tous, espèrent avoir leur part du gâteau, tout en étant rassurés par la popularité soudaine de tel ou tel sujet. Par exemple, il y a quelques années de cela, la moitié des studios hollywoodiens avait acheté les droits de jeux de société dans l'optique de les adapter en films. Mais il aura fallu attendre que Battleship coule pour calmer leurs ardeurs. 
 

 
Moralité, Hollywood est un milieu de suiveurs, et c'est encore plus vrai dans une période aussi empreinte de nostalgie qu'est la nôtre. Si Stephen King est le nouveau cool, et que le genre horrifique le permet, il n'en faut guère plus aux studios et aux producteurs avides de succès pour se lancer dans l'aventure. D'autant que la nostalgie des années 1980 et d'une certaine idée de l'horreur a déjà fait ses preuves. L'exemple le plus probant reste sans doute la série Stranger Things, diffusée par la plateforme Netflix, qui comme par hasard, se portera aussi garant de Jessie (ci-dessus) et 1922. Les gamins des frères Duffer ont prouvé que la nostalgie des eighties attirait non seulement les vétérans, mais aussi toute une nouvelle génération de spectateurs, qui n'ont parfois pas connu l'époque en question. Un double marché qui fait sans doute de l'œil à tous les ambitieux.

Reste à savoir si Stephen King lui-même y trouve son compte. Ces derniers temps, l'auteur est d'avantage connu pour ses jolis tacles à Donald Trump sur Twitter que pour ses écrits, qui cette année, se résumeront à Sleeping Beauties, co-écrit avec son fils Owen et à paraître en France. Assurément, le compte en banque de l'auteur se porte bien, et son égo aussi, puisque les différentes adaptations se succédant sur nos écrans cette année ont reçu les louanges de leur créateur. Pas nécessairement parce qu'il les sait réussies, mais plutôt parce qu'elles s'avèrent, à en croire ses mots, fidèle à l'essence de ses écrits. Des mots que nous n'avons jamais entendu à propos du Shinning de Stanley Kubrick, par exemple. A croire que la nostalgie des eighties réussit au porte-monnaie de Stephen King, mais aussi à son cœur, satisfait par une prise de risque souvent minime. Sans mauvais jeu de mots, il paraît que ça ne nous empêchera pas de découvrir l'un des meilleurs films d'horreurs de la décennie dès mercredi. Tant qu'on y trouve aussi notre compte, pourquoi pas !