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Rebels : le succès discret mais sincère du Star Wars de Disney

Par Republ33k
6 mars 2018
Rebels : le succès discret mais sincère du Star Wars de Disney

Comme tout fan ayant assisté à la fin supposée de la saga Star Wars avec la sortie de La Revanche des Sith dans les salles obscures, j'attendais beaucoup du projet The Clone Wars. Mais un film décevant, une diffusion française erratique et quelques épisodes ratés plus tard, j'étais loin d'être convaincu par la série de Dave Filoni. Une rancœur qui s'était transformée en un véritable dédain pour The Clone Wars au fil des ans, jusqu'à ce que le rachat de Lucasfilm par Disney et l'annulation du show me donne une bonne raison de me pencher une nouvelle fois sur son cas.

 

Ce qui suit ne contient AUCUN spoiler !

 
 
Mes griefs remplacés par la curiosité de découvrir un nouveau Star Wars avant les annonces officielles de Disney, j'ai plutôt apprécié mon second visionnage. Toutefois, le plus beau des avantages de The Clone Wars est aussi son pire défaut : le caractère anthologique du show le poussait à créer des one-shot thématiques complètement dingues comme des épisodes de remplissage enfantins et il faut bien le dire, franchement débiles. Malgré l'introduction d'un personnage central comme Ahsoka Tano, il a donc toujours manqué à The Clone Wars un point focal.
 
 
C'est peut-être ce qui poussera plus tard Lucasfilm a annuler la série, faute d'un arc narratif clair à défendre. C'est en tout cas ce qui mènera à la création d'une série plus concentrée pour lui servir de successeur. En 2014, Star Wars Rebels voit le jour, et d'emblée, on apprend que l'intrigue sera centrée sur un groupe de rebelles en particulier, celui qui occupe le Ghost, un autre vaisseau cargo prêt à taquiner l'Empire. Une présentation plus tard, on découvre l'équipage de cet engin, et la patte de Dave Filoni semble intacte : deux Jedi (l'un formant tant bien que mal l'autre), une pilote émérite, une Mandalorienne rose fluo, un bourrin poilu, un droïde rigolo et pas de Dark Vador ? Mes pires cauchemars revenaient toquer à la porte.

Potentiel insoupçonné 

Mais qu'il est bon d'avoir tort. J'avoue m'être trompé comme rarement en attaquant la première saison de Star Wars Rebels. Je n'écrivais pas encore ici mais mes souvenirs sont encore frais. Au fil des semaines, le scepticisme a fait place à la curiosité, avant qu'elle ne soit elle-même remplacé par un véritable enthousiasme, qui n'a pas faibli depuis. Être lentement convaincu par la série de Dave Filoni est assurément l'un des meilleurs moments de ma vie de fan de Star Wars adulte, et il y a deux ans, en pleine Star Wars Celebration, d'autres aficionados me faisaient la même confidence en attendant le panel Rebels - le plus populaire du salon par ailleurs.
 
 
Pourquoi je vous explique tout ça ? Pas parce que j'aime vous raconter ma vie - encore que - mais surtout parce que j'entends encore beaucoup de gens se plaindre de Rebels en se basant sur des impressions laissées par les premiers épisodes de la série, ou pire, des souvenirs de Clone Wars souvent faussés par l'aigreur. Et comment leur en vouloir ? Je suis moi-même passé par là, et il me semblait important de le rappeler avant d'attaquer un argumentaire digne de ce nom, histoire que même les plus sceptiques d'entre-vous puissent s'identifier à mon propre parcours.

D'incroyables personnages

J'en ai déjà touché un mot, la première force de Rebels, c'est de se concentrer sur un seul groupe de personnages - ce qui n'a jamais empêché Filoni de proposer de nombreux invités, mais on y reviendra. En choisissant de développer des personnages inédits au sein d'une époque pourtant pleine de personnages cultes, Rebels n'avait pas fait le choix de la facilité. Et c'est sans doute pourquoi nombre d'entre-vous sont encore bloqués sur les remarques irritantes d'Ezra ou les blagues de Chopper. Et pourtant. Contrairement à Clone Wars, Rebels m'a montré que Star Wars est absolument compatible avec le format sériel - ou feuilletonnant, appelez ça comme vous voulez - en développant un groupe de personnages à l'apparence anodine voire foireuse en une troupe de héros terriblement attachante.
 
 
En quatre ans, nos rebelles ont vécu des tas de choses, et les équipes n'ont jamais perdu ce groupe des yeux, lui donnant une vraie dynamique familiale au fil des épisodes et des saisons, toujours très bien racontés. Une application bête et méchante des forces de la série télévisée, mais que Clone Wars n'avait pu réaliser, la faute à un rythme et un format plus anthologique. Ici, nos héros progressent, ils grandissent, et comme la série à laquelle ils appartiennent, ils nous donnent tort. Jamais je n'aurais imaginé verser une larme pour Sabine, mais le parcours de la jeune Mandalorienne m'a tenu en respect. Dans le même ordre d'idée, le pire vilain de la série, le cartoony Agent Kallus, est devenu l'un des personnages les plus complexes de Rebels. Des transformations drastiques mais pas forcées : elles sont justifiées par un contexte de guerre et des rencontres tout simplement hors-norme.

All Star Star Wars

Puisque nous parlons de rencontres, attardons-nous sur les autres personnages de Rebels. L'équipage du Ghost a beau être centrale, il est souvent accompagné par des héros venus d'autres époques ou d'autres milieux bien connus de la saga Star Wars. Et ce qu'on aurait plus voire comme une tentative cynique de ramener de l'attention sur la série est devenu un vrai moteur pour son intrigue. Chaque rencontre a finalement servi l'histoire de Rebels et la destinée de ses personnages, comme si Filoni avait non seulement réussi à terminer le puzzle dont il avait été privé, mais qu'il était aussi parvenu à le prolonger hors de son cadre originel. Ahsoka en leader secret de la Rébellion. Les Mandaloriens qui rappellent Sabine à ses origines. Les clones qui renvoient à Kanan son échec. Autant d'exemples qui ont prouvé, au fil des épisodes, que Rebels était un moteur bien huilé, là où aurait pu le croire rouillé par les intentions de son créateur, ou l'interventionnisme de Lucasfilm.
 
 
L'arrivée de tous ces personnages a d'ailleurs fait de Rebels une sorte de "all star Star Wars", une expression que j'utilise souvent pour défendre le bébé de Filoni et sa capacité à brasser des élements de toutes les époques de la saga, y compris des mondes alternatifs. Rebels a en effet ramené de nombreux éléments de l'ancien Univers Étendu sur le devant de la scène (on vous reparle de ça dans un long dossier dans le courant de cette semaine), en plus de gérer les périodes que nous connaissons déjà. Dark Vador, Leia, Luke, l'Empereur ou encore Lando ont ainsi représenté la trilogie originale. Dark Maul, les commandants clones ou Ahsoka nous ont rappelé au bon souvenir de la prélogie et de son moment le plus fort, la Guerre des Clones. Enfin, de nombreux indices ont pointé en direction de la postlogie, vers le futur donc, ou vers le passé, via des clins d'œil prononcés à l'intention de l'Ancienne République
 
De nombreuses connexion à l'ensemble du canon Star Wars (et même au-delà donc) qui sont d'autant plus appréciables qu'elles n'ont jamais dénaturé l'essence de la série, son rythme et surtout sa propre mythologie. Bien évidemment, tout ce qu'on voit dans Rebels est officiel, et pourait donc se retrouver ailleurs, mais le show de Dave Filoni a ses propres codes, qui viennent épicer les différents ingrédients présentés ci-dessus. L'importance du règne animal, un mysticisme étendu autour de la Force ou encore une Alliance Rebelle plus complexe qu'il n'y paraît sont parmi ses signatures, et il est amusant des les remarquer chez tous les films Star Wars récemment sortis sur nos écrans. Comme si Rebels était un vrai petit laboratoire d'essai, ou un département d'assurance qualité, qui prolonge la durée des vies des concepts présentés au cinéma. Celles et ceux qui ont apprécié les folles idées de Rian Johnson ou on trouvé Rogue One un peu léger sur ses questions politiques devraient ainsi jeter un œil aux quatre saisons de Rebels, chargés de belles réflexions, et de moment forts.
 
 
Si on pourra toujours pester contre le design de la série, assez proche de ce que faisait déjà Clone Wars, on peut en effet retenir de Rebels de vrais moments de bravoure, qui ne se limitent pas au season finales et mid-season finales. Bien souvent, la réalisation de Rebels est soignée et parvient même a égaler les meilleures scènes de la saga. Sans même parler des moments où la série les dépasse par sa simple nature animée. C'était le cas la semaine dernière par exemple, dans un épisode qui aurait sans doute détruit le fandom Star Wars s'il n'avait pas fait une si bonne utilisation des techniques d'animation 2 et 3D. En embarquant dans l'aventure Rebels, vous ne signez donc pas du tout pour le Star Wars au rabais que beaucoup décrivent, mais pour une petite constellation de claques visuelles et/ou émotionnelles, et ce n'est pas le dernier épisode du show qui nous fera dire le contraire.
 
A cause d'une diffusion complexe à l'échelle mondiale (un problème que le service de streaming de Disney pourrait facilement résoudre), d'une réputation entâchée par The Clone Wars (ou son annulation) et des designs parfois très colorés, la série Star Wars Rebels n'a finalement jamais eu la reconnaissance qu'elle mérite. Pourtant, en faisant le choix d'un groupe de personnages précis, qui sont passés de simples archétypes à héros à part entière, la série de Dave Filoni a fait bien mieux que son aîné, et démontre d'une formidable capacité à brasser toutes les époques de la saga Star Wars sans sacrifier sa propre mythologie. A l'heure où l'avenir des films Star Wars est incertain ou tout simplement inconnu, on vous recommande donc chaudement d'y (re)jeter un œil.

God speed, rebels.
Rebels : le succès discret mais sincère du Star Wars de Disney