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On a échangé avec Anne-Claire Doly, l'autrice de Sous la Lune brisée !

Par Aetherys
4 min 18 mars 2024
On a échangé avec Anne-Claire Doly, l'autrice de Sous la Lune brisée !

Aujourd'hui, chez Syfantasy, on vous propose un entretien exclusif avec Anne Claire Doly, réalisé durant le salon du Magnifique Livre à Lyon !

 

Anne Claire Doly, en plus d'être professeur agrégée en philosophie et pianiste, est l'autrice de Sous La Lune Brisée, roman paru au Label Mu des Éditions Mnémos en mai 2022, dont voici le synopsis :

Sous les fragments jumeaux de la lune brisée, la République des Neuf Cités tente de survivre sur un continent convalescent, menacée par la corruption grandissante du pouvoir et une guerre aux frontières qui ébranlent le régime des Gardiens.

Des usines métallurgiques où la gronde est plus forte chaque jour aux montagnes ocres où se massent les réfugiés, chacun devra faire face à ses choix, ses secrets et ses désirs pour échapper au chaos, et tenter de dessiner un autre avenir.

 

 

Merci d'accepter cet entretien pour Syfantasy.fr afin de revenir sur les traces de ton premier roman, Sous la Lune Brisée

Pour commencer, qu'est-ce qui t'as amené à développer ce genre de thématique au cœur d'un récit aussi dense, que ce soit le cadre politique comme le récit choral ?

 

A.C Doly : Bonjour Morgan, merci pour cet entretien ! 

Eh bien en fait, je n'avais pas pour ambition d'écrire un récit aussi long, au début ! Je voulais parler d'une utopie qui avait mal tourné, et de par ma formation en philosophie, j'ai eu envie de transposer certains éléments d'un des ouvrages clés de l'histoire de la philosophie, La République de Platon, récit où il imagine la cité parfaite. Ironiquement, cette cité est loin d'être démocratique, mais plutôt élitiste, ce qui m'a servi de terreau pour développer mon propos. Quant  à l'aspect post-apo, même s'il n'est pas très développé dans le roman, c'était avant tout afin d'avoir un cadre pas trop futuriste, afin de justifier ce retour en arrière technologique global. 

 Quant au cadre politique, je voulais développer cette utopie qui s'épuise, à bout de souffle, aggravé par des classes élitistes se complaisant dans leur inceste. 

C'est cela qui m'a amené à développer le personnage de Olis, qui du fait de ne pas avoir été dans les bonnes écoles est étouffé par sa rage adolescente et par sa classe populaire, dont il a envie de s'émanciper. Idem en ce qui concerne sa relation toxique avec sa propre mère, devenue prostituée dans les bas quartiers pour échapper à l'emprise des hautes sphères. 

Pour l'aspect choral, c'est un élément que j'adore, en tant que lectrice. J'aime écrire à plusieurs voix, et ça me permet d'envisager un univers avec toutes ses facettes, afin de coller à une réalité plus globale et complexe. J'aime multiplier les points de vue !

Je voulais avoir trois personnages dévoilant les différentes classes sociales de mon roman, ainsi que, au travers du personnage de Hadrian, pour questionner l'homosexualité au sein de l'armée. 

 

 Et comment se passe ton processus d'écriture, généralement ? As-tu été satisfaite du résultat ? 

 

Mon process est très organique. J'ai peu de plans, je pars avec ma situation initiale, mon cahier et quelques notes et c'est parti. Avec Sous La Lune Brisée, le premier jet s'est fait en 4 mois, j'ai même été étonnée par la fin que j'ai développé presque sans le vouloir ! (rires).  Je suis très satisfaite des couples et tandem que j'ai construit, Hadrian et Côme, Olis et sa mère, Alexandre et Arianna... Un des personnages secondaires me vient d'ailleurs de quelqu'un ayant réellement existé : un berger pyrénéen ayant fait passer des émigrants en France, condamné à plusieurs procès pour son acte... 

Ça m'a  intéressé de voir le cheminement du personnage de Hadrian, face à la liberté d'esprit de Côme, car pour moi, on n'avance jamais seul. Je crois profondément et humainement à ces rencontres qui nous marquent, amicales comme amoureuses... Pour Olis, par exemple, ce sera ce vieil homme qui repère ses capacités latentes, et qui va le sortir de sa condition sociale et de sa relation avec sa mère, afin d'en faire un homme.

C'est d'ailleurs l'une de mes grandes pistes de réflexion, dans Sous la Lune Brisée, avec le personnage de Plus et surtout celui de Alexandre : qu'est-ce qui fait qu'on reste humain, malgré la violence ?

Ensuite, pour en revenir au processus, l'écriture ne doit pas avoir pour base une idée trop rigide. Le récit doit s'étoffer de lui-même, et c'est de là que quelque chose émerge, comme une sorte de psychanalyse. Soit ça réveille des choses sur soi, soit ça aide à formaliser des concepts qui sortent de la  bouche du personnage. Chaque personnage que j'écris me renforce, finalement ! 

 

Comment t'es tu sentie après l'écriture ?

 

J'étais vidée psychologiquement, comme après un accouchement. Platon et Socrate ont un terme pour cela, qui s'appelle la maïeutique, ou l'art de faire accoucher les esprits (rires). C'est un peu ça que j'ai ressenti, une sorte d'accouchement métaphorique ! Y a un sentiment d'accomplissement, une grande satisfaction, même s'il y a eu un gros travail de réécriture après le premier jet. 

 

Dans ton roman, on retrouve un modèle narratif très orienté sur les introspections plutôt que sur l'action. Pourquoi ce choix ? 

 

Dans la narration de manière générale, il y a deux grandes écoles, et l'une d'elle est le fameux show dont tell. Moi, dans ce roman, on est exclusivement sur ça : de l'introspection, sur de la psychologie. Je fais partie des auteurs qui n'hésitent pas à longuement développer la psyché des personnages, afin de comprendre les motivations derrière leurs actions. 

C'est une manière particulière d'approcher la littérature et j'en ai conscience, mais pour développer des personnages sombres, on a parfois besoin d'aller en profondeur et d'explorer les racines du mal, même si, pour être honnête, il n'y a aucune vraie réponse à cette question. 

Ce qui est intéressant aussi, en tant qu'auteur, c'est d'écrire sur des personnages qui nous paraissent complètement étranger... Quand j'ai écris Sous La Lune Brisée, j'avais beaucoup de mal à construire les personnages féminins, ironiquement ! J'ai eu beaucoup plus d'aisance avec Hadrian qu'avec Ariane, alors qu'elle me ressemble davantage ! 

 

Pour le mot de la fin, peux-tu nous parler de ton prochain romain ? 

Ça s'appellera Ceux de la Montagne Évanouie, un roman dans lequel j'ai mis tout mon amour de la montagne avec une grosse dose de réalisme magique ! Je suis parti d'un fait divers réel : une tempête ayant coupé du monde une vallée des Alpes. C'est un récit choral comme Sous La Lune Brisée, et j'y aborde des thématiques variées mais familières pour celles et ceux qui auront déjà lu mon précédent roman ! 

 

Merci beaucoup d'avoir répondu à mes questions, Anne Claire, et on se retrouve le 5 juin 2024  pour la parution de Ceux de la Montagne Évanouie ! 

On a échangé avec Anne-Claire Doly, l'autrice de Sous la Lune brisée !